Des plongeurs qui bloqueraient un projet de réserve… Damned, de quoi s’agit-il ? D’un projet de cantonnement de pêche d’une surface de 100 hectares, entre Carnon et Palavas (Hérault), interdit à toute activité, hormis la navigation, durant une période de 5 ans. Le temps de laisser la zone se régénérer et d’en faire le bilan halieutique à l’issue de l’expérience.
On imagine mal les plongeurs, favorables à toutes mesures de protection du milieu, s’opposer à une telle résolution. D’ordinaire, les  » méchants », ce sont les pêcheurs professionnels. Or, dans ce cas précis, l’initiative revient à ces derniers. Voté par la prud’homie des pêches de Palavas en 2011, le projet a mis du temps à se mettre en place pour définir la zone exacte, établir un état des lieux par un bureau d’étude, etc. Et son application était prévue l’an dernier déjà.
Problème : c’est dans le périmètre de protection finalement retenu qu’une vingtaine de structures plongée ont les sites les plus attractifs ou pertinents pour leur activité d’exploration et de formation. Les priver de ces spots revient donc à mettre en péril leur économie, déjà fragile. Sans compter les clubs associatifs qui fréquentent également la zone. Le Codep 34 de la FFESSM s’est d’ailleurs joint à eux pour demander des aménagements et/ou dérogations.

Cantonnement-palavas-prud'hommie

M. Daynac, premier prud’homme de Palavas

Nous sommes partants

« Bien sûr que nous ne sommes pas opposés à ce cantonnement ! Dire que nous y sommes opposés est un raccourci de langage hasardeux, clament-ils. Bien au contraire, nous y sommes totalement favorables. Nous demandons simplement l’autorisation de pouvoir y conserver au moins quelques sites sur lesquels poursuivre notre activité. Nous avons expliqué que la plongée n’était pas incompatible avec la protection de la ressource. Il suffit de voir les exemples de Port-Cros ou des îles Medas où tout se passe très bien. Nous sommes évidemment prêts à jouer le jeu, mais on souhaite juste y conserver 2-3 sites accessibles. Nous avons proposé d’élargir le cantonnement, de le décaler un peu si nécessaire, d’y installer des bouées d’amarrage pour limiter l’impact, mais rien n’y fait, les pêcheurs demeurent inflexibles. »
Du côté de ces derniers, c’est en effet tout ou rien. Leur représentant M. Daynac, premier prud’homme, s’en explique : « Je comprends parfaitement que ce cantonnement puisse nuire à l’économie des plongeurs. Mais pour nous aussi il constitue une contrainte. Il a déjà été assez difficile de le faire admettre par les collègues. Par ailleurs, il existe aussi des réserves où la plongée est interdite. Cela constitue certes un manque à gagner, mais pour tout le monde. »

Même règle pour tous

Mais pourquoi ne pas faire preuve d’un peu de souplesse et ne pas conserver quelques sites accessibles ? « Parce que ce n’est pas possible dans la réalité, rétorque M. Daynac. Comment voulez-vous autoriser certains et pas d’autres ? Comment expliquer aux collègues de Sète, du Grau-du-Roi ou même au simple pêcheur du dimanche que eux n’ont pas le droit d’y exercer leur activité alors qu’il y a un bateau de plongée à côté ? Déjà que ce sera à nous d’y faire la police, qu’il faudra bien deux ans avant que ce cantonnement ne soit accepté et respecté par tous, cela sera ingérable si l’on doit accorder des dérogations à untel et untel. »
Bref, le dialogue est dans l’impasse et le projet au point mort. Il est vrai que cette portion de côte, plate et sédimentaire, est plutôt pauvre en reliefs et accores. Ce qui cristallise les opinions et ne simplifie pas la donne. Pour l’instant, la préfecture botte en touche, enjoignant les acteurs de se mettre d’accord. Mais en attendant que chacun mette un peu d’eau dans son Fitou, les sars du banc de Porquières continuent de trinquer.

carte-cantonnement-Palavas

Texte et photo sous-marine : Daniel Deflorin