Un signe de Sean, coup d’œil à l’ordi – oups, c’est vrai que ça commence à taper – O.K., on décroche. Et c’est parti pour une séance de space invaders en dérive dans le courant ! Sauf que les aliens, c’est nous. Stabilisation avec rétro-palmes, poumon ballast et survol statique en apesanteur sur la tortue. Sympa. Sauf qu’on y serait quand même resté plus longtemps, là, en bas.
Texte et photos Daniel Deflorin

Sur le seuil de la passe, c’est le multiplex en 3D. Toutes les têtes d’affiches de la mer figurent au générique. À commencer par les requins, dans un rôle à contre-emploi, celui des froussards de service. Plus cabotines, les carangues leur donnent la réplique tandis que les thons crèvent l’écran. Quant aux raies, autres bankables, leur passage est toujours aussi remarqué. À vrai dire on ne sait plus où donner de la tête. À droite, à gauche, au-dessus, partout il se passe quelque chose ! Seul le confort de cette salle ouverte en grand sur la nature laisse à désirer. Un courant à vous défriser les moustaches du détendeur balaie la passe en permanence. Mais c’est justement sa présence qui concentre ici toutes les vedettes du monde sous-marin, à tel point qu’il faut souvent s’ancrer avec une longe pour ne pas dégager. Ou plutôt pour ne pas torcher son bloc en moins de deux avec des chapelets de bulles faisant fuir ceux pour qui nous sommes là. Mais l’ordi et le guide nous rappellent à l’ordre. Oui, oui, c’est bon, compris, on décroche…


Et c’est comme ça tous les jours. Loin, très loin de tout, dans le grand Sud des Maldives. On aurait pu se contenter d’une croisière classique, plus au Nord, avec jardins de coraux et mantas. Mais les petits copains sont venus pour le grand Sud, pour se frotter avec les courants, ces vents océaniques qui rentrent dans les atolls par les passes au rythme des marées. Telle une gigantesque et lente respiration, ils emplissent et vident le bassin des atolls, ceinturés par les îles et les récifs frangeants. Et charrient avec leurs mouvements les nutriments concentrant la faune du large.

Au-delà de l’équateur

Aux Maldives, tout commence à Malé. Après une petite mise en palme progressive sur des thilas (secs), une épave ou des tombants coralliens, c’est parti pour l’aventure. Car même si le bateau est tout confort avec douche chaude, air conditionné, bar et écran plat coins carrés, cela reste une aventure, accessible à tous. “Un peu plus à l’Ouest”, répétait le professeur Tournesol. Pour nous cela sera plus au Sud, toujours plus au Sud, très loin.
Les atolls et les plongées se succèdent : Malé Nord, Malé Sud, Vaavu, Fushi Kandu, Huvadhoo… Nous passons même la ligne de l’équateur pour aller jusqu’à Foammulah et Addu Atoll. Au total un périple de près de 1500 km avec un détour par Ari Atoll au retour et près de 2000 L de fuel entre le bateau et le dhoni de plongée ! Quand on vous disait que cette croisière restait une aventure ! Autant dire qu’entre les plongées et la navigation, même si les grandes traversées s’effectuent de nuit, pas le temps de faire du tourisme. Les îles, nous ne les verrons que du bord. Car l’originalité de cette croisière est d’être orientée vers des passes isolées, dans le but de maximiser les probabilités d’observation de la grande faune. Oh bien sûr, certains feront faux bond. Les requins baleines notamment, malgré le phare de 2000 W sur la plage arrière pour attirer le plancton et son prédateur. Ou les mantas dont l’habitat régulier est plus au Nord. Mais pour le reste, pari gagné !

Entrée en piste des acteurs

Les plongées ont généralement le même le profil. Après que le guide a vérifié le sens du courant, on se met à l’eau à un angle extérieur de la passe. Puis on descend jusqu’au seuil, entre 30 et 40 mètres, et là on attend l’entrée en piste des acteurs. Un festival ! Quand ce ne sont pas les requins, par endroits ce sont d’énormes bancs de lutjans, des carangues par milliers ou des barracudas. Inutile de tenter un inventaire à la Prévert.

Chaque plongée est différente de la précédente, sans négliger les “décompressions” sur des jardins coralliens avec toute la petite faune des récifs. Le grand Sud des Maldives ne se raconte pas, il se vit, chacun y trouvant ce qu’il est venu chercher. À condition d’avoir un minimum d’expérience, le courant pouvant être perturbant pour un débutant. Et si vous n’avez pas deux semaines à y consacrer ou si vous préférez un séjour plus “pépère”, il y a d’autres circuits. Avec ses 1200 îles et ses 26 atolls, les Maldives ont à coup sûr un spectacle sur-mesure à offrir. Un exemple : au passage de la ligne, au retour, ce sont des dauphins de Risso qui sont venus jouer dans l’étrave. Y a pire non ?

 

Remerciements à DUNE www.dune-world.fr et à AMV SUBOCEA www.amv-subocea.com

Retrouvez toutes les infos pratiques de ce séjour et les destinations du dossier voyages “Escales en pays sous-marins” dans Plongée Magazine n°56

+ un guide de voyage plongée aux Maldives dans notre rubrique Top destinations

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