En raison des différentes variations du niveau de la mer qu’a pu connaître notre planète, nombre de vestiges préhistoriques se trouvent aujourd’hui enfouis sous les flots. Mais leur exploration n’est pas assez développée, comme le souligne un récent rapport publié par le European Marine Board et auquel ont participé des chercheurs de l’Ifremer : « Land beneath the waves : submerged landscapes and sea-level change » (« De la terre sous les vagues. Paysages submergés et changement du niveau de la mer »).

Pendant les périodes glaciaires, le niveau de la mer a en effet baissé à plusieurs reprises, jusqu’à 120 mètres. Lors de ces « chutes maritimes », le plateau continent a vu sa surface d’exposition augmenter et le terrain occupé par les hommes préhistoriques s’est donc étendu. Les premières routes entre l’Afrique et l’Europe, ainsi que les zones où nos ancêtres ont survécu aux périodes glaciaires, sont dorénavant immergées. Dans les eaux littorales et même en pleine mer, ce sont plus de 2500 assemblages d’artefacts préhistoriques qui ont été trouvés.

Mais seule une infime partie a été correctement cartographiée par les plongeurs, ou évaluée pour la conservation ou l’excavation. Une absence d’études qu’il est urgent de combler pour mieux comprendre comment vivaient les peuples de la Préhistoire, les structures sociales et les technologies d’exploitation des ressources côtières avant l’introduction de l’agriculture. D’autant que les vestiges submergés subissent dangereusement les effets de l’érosion naturelle et les perturbations industrielles. Et comme le précise Jean Mees, président de l’European Marine Board : « Notre patrimoine culturel submergé n’est pas une ressource renouvelable ; c’est un atout culturel unique et irremplaçable qui peut fournir des réponses à de nombreuses questions scientifiques, au sujet de nos ancêtres préhistoriques, des paysages et du climat. » Les recherches pourraient effectivement nous renseigner sur la manière dont l’Homme est parvenu à s’adapter à l’évolution du niveau de la mer. Une problématique faisant écho aux enjeux de nos civilisations modernes, aujourd’hui confrontées à la montée des océans avec le réchauffement climatique.

Texte C. Cioni